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24 mars 2015 2 24 /03 /mars /2015 19:53
Le Prince de Laurent Gutman

Voilà un spectacle malin et drôle. Une mise en situation de la pédagogie politique de Machiavel, dans un centre de formation contemporain où un professeur misogyne qui se prend pour César Borgia, assisté d'une jeune femme énergique et bien dans son temps, dispensent à trois stagiaires l'enseignement du conseiller de Laurent de Médicis.

Les deux formateurs s'approprient des extraits du texte original, et l'intègrent à différentes mises en situation : tour à tour les stagiaires (une bourgeoise quarantenaire, un jeune homme timide en costard-cravate, et un métalleux barbu en jogging) portent la couronne et grimpent sur le trône - la banquette arrière d'une peugeot "coupée" (oui, vraiment coupée en deux). Pour les entraîner à exercer leurs talents (relatifs), le public endosse le rôle du peuple et permet de tester la crédibilité ou la popularité de chaque apprenti prince.

Le résultat met en lumière bien sûr l'actualité absolue du texte de Machiavel, mais aussi déchaîne les rires du public, car le jeu est vif, les comédiens brillants, et les gags ne manquent pas pour illustrer les erreurs des politiques, jusqu'au simulacre de viol d'une (fausse?) spectatrice par, a priori, le plus réservé des stagiaires - mais le goût du pouvoir semble leur monter à tous à la tête et favorise la montée des conflits, complots et autres paranoïas de la part des candidats à la couronne.

Le Prince, d'après Machiavel. Mise en scène et scénographie : Laurent Gutman.

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18 juillet 2013 4 18 /07 /juillet /2013 12:30

C'est sûrement la chaleur - qui fait monter la pression, qui porte à ébullition - les particules, les mots les micro-émotions. Ca monte et ça grouille, ça fait des gros bouillons, dans la gorge, dans la tête, dans la poitrine, le centre de gravité s'est élevé, le volume semble augmenter, attention à l'évaporation - ou à l'implosion ? c'est un infernal ballet, une exacerbation, les petites hontes, le jazz, les deuils, l'été, le plaisir, les SMS qui sonnent, les désirs, les images d'un sourire, les frustrations, les photos les cheveux dans le vent, les petits coups de colère, l'eau fraîche qui soulage sur la peau mais vite, ça sèche - ça s'évapore - les pores qui transpirent, les dents qui grincent, l'obstination, l'amitié, les notes de piano, les soupirs étouffés, les envies ravalées, la fumée de cigarette à la menthe et les cris de Camille.

Tu te couches et tu te relèves. Toutes ces questions. Ces élucubrations. Tu es monomaniaque, bimaniaque, trimaniaque et polygame. Tu es dans l'expectative, pour la stabilité, et transpercée de puissance, d'impuissances. Tu es dans la rythmique, écrasée de chaleur, bourrée d'idées folles. Tu es en colère, tu pleures de joie, ta volonté est grande, tes rêves emberlificotés. Tu grilles le temps, tu casses le mythe, tu bois de l'eau fraîche. Tu es résignée. Tu prends de la distance. Tu prends le temps. Tu prends la route. Tu goûtes les petits moments, tu te prends pour un oiseau. Tu suis les bateaux du regard. Tu serres les poings. Tu changes de CD. Tu te couches et tu te relèves. Tu as soif tu es épuisée. Mais tu n'as pas sommeil.

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17 juillet 2013 3 17 /07 /juillet /2013 20:50

 

 

 

Ca résiste. Voilà des jours et des jours qu'il fait chaud à en crever, qu'il est dur de se concentrer, que l'appétit a disparu, que la soif l'a remplacé, tenace. Que tout est exacerbé.

- Il fait lourd, là (on insiste sur le mot "lourd", comme s'il était en italiques, comme si c'était une trouvaille, après une réflexion intense. En effet, il ne fait pas juste chaud, il fait... "lourd, là").

- Ah, oui, ça va péter.

 

Ce bout de conversation, vous le remarquerez, tourne et revient comme une litanie. A chaque fois c'est une nouvelle réflexion intense. Forcément. On a le cerveau ramolli, les neurones qui se dilatent, la concentration qui fout le camp, le vocabulaire qui se carapate.

 

S'amariner - il dit. C'est un joli mot que je ne connaissais pas.
Je m'amarine, tu t'amarines.
C'est joli aussi à la deuxième personne. Ca fait tamaris, un tamaris au bord de la mer. Avec un petit vent léger qui fait voler les cheveux et respirer la peau.

Mais ici, il y a le bruit des voitures, avec cette déviation, c'est infernal, urbain, trop urbain, et ce camion-grue, là, il n'a pas le droit de passer ici, il doit faire le tour, là-bas - mais justement, il y a cette déviation.
Ca klaxonne il fait chaud le vent est décidément absent mais ce n'est pas si mal, c'est l'été, et pour se rafraîchir il y a les bières.

Et comme c'est toujours au début qu'elle est la meilleure, on en reprend une.

 

Il fait "lourd, hein".
Mais c'est l'été réjouissons-nous. Les insectes sont de sortie, nos orteils aussi. Rouges ils sont, sur les ongles. Ou bleus. C'est joli. Les miens sont violets. Comme un tamaris. Comme l'orage, qu'on attend, qu'on redoute, et qui finalement ne passera pas par là.

Les nuages sont repartis. Le soleil revient en force. La soirée avance, il fait de plus en plus chaud. La lune sera orange.

C'est bien.

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9 juillet 2013 2 09 /07 /juillet /2013 18:40

Le désir est sans fond - la chaleur est immense

l'espoir comme le désespoir comme aussi les termites grignotent de l'intérieur attention à l'effondrement la gravité on ne peut plus lutter quand c'est creux quand la matière n'est plus que poussière quand la sonnerie retentit quand c'est la fin le retour il faut ressortir les trains d'atterrissage si on ne veut pas s'écrabouiller s'embraser

"un lieu de peine qui pleure joyeux"

les basses résonnent socle généreux s'asseoir dessus se reposer les ailes les nerfs

les moustiques ont muté ce sont des tigres des zèbres des ours siffleurs et la démangeaison comme le désir est sans fin

les journées buggent comme un disque rayé se répètent s'étirent

L'impatience, ça ralentit les aiguilles ma p'tite dame !

 

 

 

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29 juin 2013 6 29 /06 /juin /2013 14:58

Check me, check me - 


Tous aux abris - Monsieur vous n'êtes pas sérieux - Plus personne ne l'est - C'est l'apo, c'est l'aco, c'est l'alcoocalypse - Calypso apocalyctique - sur sa Harley la chimère a coulé - mais il paraît qu'elle sait nager - et Keziah Jones nous sauvera - Keziah Jones reviendra - parmi les pécheurs - Pécheurs de lune - Lune en cancer - tous aux abois - tous aux abris - Vénus a démissionné

 

See there is no

Oh Oh Oh -

Que disent les Anciens ?

L'océan est trop froid - Les ruisseaux sont trop pleins - Comme les canalisations - Les vaches, elles, ne savent pas nager - Toutes aux abris - à l'étable mes très chères - Poséidon ne répond pas

 

Can't you see there is no

Oh Oh Oh -

Le petit bonzaï est mort - il s'est noyé dans ses larmes - il a dû payer, il faut payer, les PV, les souvenirs, la mutuelle, les rêves, la téléassistance et les rayures jaunes - Mademoiselle vous n'êtes pas sérieuse - et votre rétroviseur ? Enfin ! Y'a plus d'saison ma bonne dame - mais un été ? pour quoi faire ?

 

Nothing to worry about

 

 

 

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16 mai 2013 4 16 /05 /mai /2013 18:00

- Tu es une petite chose ratatinée et grise. Une tout petite chose qui se plisse quand elle inspire, sur le point de disparaître. Puis tu prends une grande respiration, histoire de te regonfler de te grandir, mais tu dois bien, au bout d'un moment, lâcher la tension, et tu retrouves ta forme informe, ta petitesse insignifiante. On te marcherait presque dessus, dis donc. Qu'est-ce qui te tient ? rien. La pluie te mouille, l'asphalte déteint sur toi, le claquement des talons recouvre les balbutiements que tu tentes de faire sortir d'une poitrine en asphyxie, de tes lèvres tremblotantes.

Le vent te bouscule et tu grelottes.
Misérable petite chose. Invertébrée, décérébrée. On te dessine en creux. On ne te regarde pas. On ne voit même pas. Des rides, une petite peau flasque translucide.

Mais tu ne te refais pas dans la ville bruit parmi les éléphants. 

 

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27 avril 2013 6 27 /04 /avril /2013 10:26

PhotoLotMedea42-web-copie-1.jpg

 

Baptême du butô pour moi ce jeudi au Théâtre des Quatre Saisons à Gradignan, avec le spectacle Médéa : lecture de et par Pascal Quignard, danse de Carlotta Ikeda, musique d'Alain Mahé.

Je lis du butô que c'est une "danse fantomatique" et cela m'étonne. Cela me paraît au contraire très incarné. A la limite de la danse et du théâtre, puisque l'histoire de Médée est jouée, avec une corporalité et un visage expressifs à l'extrême. Le tragique coupe le souffle.

En introduction, c'est une lecture de Pascal Quignard, une voix profonde, un peu rauque, un texte très beau où il nous conte son histoire de l'héroïne grecque. Qui tombe amoureuse de Jason, lui donne la Toison d'or, a deux fils de lui, avant qu'il ne la trahisse en épousant Créuse. S'ensuit la série de meurtres : Médée tue sa rivale puis ses deux fils, enfin le foetus du troisième enfant en se fouillant le ventre avec un sabre.

L'histoire est donc ensuite reprise - personnifiée - par la chorégraphe et danseuse japonaise. Sur un coin de la scène, le musicien à genoux compose en direct une musique assistée par ordinateur, s'aidant de cailloux qu'il frotte, caresse, griffe, jette. Le son est atroce par moments, des grésillements éclatent dans les enceintes, se superposant à des sons de nature, minéraux, et à une musique japonaise très belle.

Et Médée déambule, gesticule, au rythme de son destin tragique, de ses déchirements intérieurs, de sa douleur d'épouse et de mère. Dans des gestes lents et par éclairs violents, et précis, les traits tendus, maîtrisant royalement crispation, tremblements, tenant le regard dans l'écrasement du tragique.

On n'en sort pas indemne.

 

Tournée de la compagnie Ariadone. Médéa

Carlotta Ikeda : chorégraphie et interprétation / Pascal Quignard : texte / Alain Mahé : musique / Stéphane Vérité : conseiller artistique / Laurent Rieuf : régie générale / Eric Blosse : création lumières.

A partir du livre de Pascal Quignard, Medea, Editions Ritournelles.

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22 avril 2013 1 22 /04 /avril /2013 22:04

C'est la voix de Jean-Louis Murat qui accroche, au premier abord. Un timbre unique, envoûtant, sensuel je dirais.

Et vraiment rare.

Les rythmes aussi envoûtent. A condition de vouloir se prêter au jeu du manège, et de ses tours. Il paraît que cela s'appelle l'ostinato - cette petite phrase qui ouvre un morceau, et qui se répète, se répète, sur laquelle tout va venir se poser.
Oui toutes ses chansons - certaines plus, d'autres moins - sont ainsi structurées.

Et en concert, sur la tournée 2013 du dernier album, "Toboggan", une mise en scène plutôt séduisante vient redoubler l'ostinato : trois écrans dans le dos des deux musiciens sont disposés comme un paravent, et s'y projettent des images qui bougent. Des plans qui durent à chaque fois le temps de la chanson : la caméra est embarquée dans la voiture et c'est une route de campagne, la nuit quand il neige. Ou bien des images d'une cédéthèque, et ça tourne en boucle. Ou quelque chose qui ressemble à un manège, aux jambes d'une fille. On flirte avec l'abstrait, mais on est plongé à chaque morceau dans une couleur, une ambiance. Et la tête tourne.

Quant à la musique, c'est amusant, car il y a Jean-Louis Murat avec sa guitare électrique, et le batteur avec sa batterie. Point. Tous deux en costard cravate semblent deux directeurs financiers échappés d'une réunions. Ils sont dans la retenue, pas d'hystérie, on assume son âge et sa cravate, on "lâche rien", dit le chanteur dans un clin d'oeil. Ses textes sont entre raffinement extrême et absurde. En fait on est dans le décalage permanent avec ce Murat aux yeux bleus, presque l'oxymore.

Très très bon moment pour qui aime cet univers de balade / rock (oui oui, les deux), pas forcément réservé aux initiés, car l'ostinato justement donne très vite un sentiment familier.

 

Murat_face.jpg

 

 

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22 avril 2013 1 22 /04 /avril /2013 21:35

Je suis allée écouter / voir Amandine Beyer jouer des sonates et partitas de Bach, sur un violon d'époque.

Cette fille (car elle est jeune, jeune) est incroyable. Dans son petit jean slim gris, avec sa coupe de garçonne, pas maquillée ou si simplement, elle est debout et elle joue du violon, sur une scène nue et des petits talons noirs.

De temps en temps elle explique son programme, le sourire aux lèvres, comme si elle était devant toi, à la maison.

Dans cette parfaite économie de gestes, de mise en scène, dans une admirable discrétion - on dirait "naturelle" - la voici qui débite ces mouvements qui te rentrent dans les tripes, crescendo.

Il paraît qu'une petite querelle sépare les grands musiciens, je la mettrais volontiers du côté de ceux qui ne revendiquent aucune interprétation quand ils jouent en public. Ceux-là avouent simplement aligner les notes, pour arriver au bout de leur programme, dans le tempo, réservant le travail d'intention aux enregistrements studio, quand ils peuvent monter les morceaux a posteriori.
Amandine Beyer serait de ceux-ci, et par la grâce du hasard, tout naturellement, elle ferait de cette oeuvre magistrale un moment grandiose.

 

arton62282.jpg © Jean-Baptiste Millot pour Qobuz.com

 

 

 

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6 avril 2013 6 06 /04 /avril /2013 07:58

entre-deux-rives.jpg

 

 

Ce n'est pas parce qu'Emmanuel de Waresquiel m'est très cher que ce qui suit, suit.

Entre deux rives est une très agréable surprise. Son auteur, Emmanuel de Waresquiel, est jusqu'ici surtout connu dans le rayon "histoire" des librairies. On lui doit, parmi une grande production en tant qu'auteur et directeur de collection, une biographie de Talleyrand publiée chez Fayard qui s'est trouvé un public aussi nombreux qu'enthousiaste.
Et voilà que cet historien se pique de passer à la littérature.
Et il fait bien.

Car cet essai littéraire est un véritable bonheur pour ceux qui aiment les lettres et les hommes de lettres.

Il dresse le portrait de dix écrivains, sous l'angle de leur mort, du temps qui passe et dont ils ont pleine conscience qu'il les mène à leur fin. Mort voulue ou pas, toujours elle est attendue, et c'est elle qui, a posteriori, éclaire une vie, une oeuvre, une sensibilité. On apprend beaucoup dans ce livre, sur Paul Léautaud, Stefan Zweig, Julien Gracq, Nerval, Brasillach... pour ne citer que les plus connus, et ces dix hommes - ceux qu'on chérissait déjà, ceux qu'on n'aimait pas spécialement, et ceux qu'on ne connaissait pas du tout - on les aime, sous la plume d'E. de Waresquiel, dans cette dimension intime qui est ici mise au jour. Sans compter que le style n'est pas en reste, loin de là : au-delà d'un travail de recherche où l'on reconnaît tout de même le professionnalisme de l'historien, un véritable style porte ces courts chapitres où seul l'essentiel est dit, dans un certain petit désordre, et charrie toute l'émotion. 


Entre deux rives, Ed. L'Iconoclaste, 2012. 342 pages.



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