Cette reprise par Malia est belle - mais je n'ai pu trouver la version de Carlos d'Alessio.
India Song, le film de Margerite Duras. 1975. Delphine Seyrig et Michel Lonsdale.
Osé. Particulier.
Esthétiquement c'est une gageure. Filmer un château de Bourgogne, ces personnages immobiles, pour donner l'illusion qu'on est à Calcutta et que ces personnages parlent.
En réalité les voix sont off, la caméra est toujours à l'écart. On ne voit jamais le tableau d'ensemble. On ne voit que ce qui est hors champ.
Et l'obsession.
L'encens qui fume, les roses roses, la pénombre. Des silhouettes et des voix. Comme si on était dans l'idée, dans l'abstrait.
Une ambiance et des histoires croisées qui s'annulent. Des personnages qui s'annulent - ne supportent pas, jamais. La chaleur est trop forte, la mousson, l'amour, tout est insupportable.
La folie qui guette comme ce miroir omniprésent où tour à tour ils viennent se dédoubler.
Les plans fixes, ou si lents qu'on se demande quand, le mouvement.
Une sensualité.
Une lenteur - gênante, parfois.
Des paroles pour rien qui s'annulent elles aussi.
En revanche, le mouvement, l'énergie, sont dans la musique. Une musique qui fait le film, la réalisatrice lui a donné tout le champ, tout l'espace. Et cette musique est si belle, si pleine, qu'effectivement, le reste...
Elle le dit, Marguerite Duras :
"À vrai dire, je ne sais pas trop d’où il vient Carlos d’Alessio, on dit du pays argentin, mais lorsque j’ai entendu sa musique pour la première fois, j’ai vu qu’il venait du pays de partout, j’ai vu des frontières aplanies, des défenses disparues, la libre circulation des fleuves, de la musique, du désir, et j’ai vu que j’étais aussi bien de cette nation argentine que lui, Carlos d’Alessio, de ce Viêtnam, du Pacifique Sud, quelle joie, j’ai été heureuse, et je lui ai demandé de faire la musique pour un film de moi, il a dit oui, j’ai dit sans argent, et il a dit oui, et moi j’ai fait les images et les paroles en raison du blanc que je lui laissais pour sa musique à lui..."