Voilà un spectacle malin et drôle. Une mise en situation de la pédagogie politique de Machiavel, dans un centre de formation contemporain où un professeur misogyne qui se prend pour César Borgia, assisté d'une jeune femme énergique et bien dans son temps, dispensent à trois stagiaires l'enseignement du conseiller de Laurent de Médicis.
Les deux formateurs s'approprient des extraits du texte original, et l'intègrent à différentes mises en situation : tour à tour les stagiaires (une bourgeoise quarantenaire, un jeune homme timide en costard-cravate, et un métalleux barbu en jogging) portent la couronne et grimpent sur le trône - la banquette arrière d'une peugeot "coupée" (oui, vraiment coupée en deux). Pour les entraîner à exercer leurs talents (relatifs), le public endosse le rôle du peuple et permet de tester la crédibilité ou la popularité de chaque apprenti prince.
Le résultat met en lumière bien sûr l'actualité absolue du texte de Machiavel, mais aussi déchaîne les rires du public, car le jeu est vif, les comédiens brillants, et les gags ne manquent pas pour illustrer les erreurs des politiques, jusqu'au simulacre de viol d'une (fausse?) spectatrice par, a priori, le plus réservé des stagiaires - mais le goût du pouvoir semble leur monter à tous à la tête et favorise la montée des conflits, complots et autres paranoïas de la part des candidats à la couronne.
Le Prince, d'après Machiavel. Mise en scène et scénographie : Laurent Gutman.