Ca résiste. Voilà des jours et des jours qu'il fait chaud à en crever, qu'il est dur de se concentrer, que l'appétit a disparu, que la soif l'a remplacé, tenace. Que tout est exacerbé.
- Il fait lourd, là (on insiste sur le mot "lourd", comme s'il était en italiques, comme si c'était une trouvaille, après une réflexion intense. En effet, il ne fait pas juste chaud, il fait... "lourd, là").
- Ah, oui, ça va péter.
Ce bout de conversation, vous le remarquerez, tourne et revient comme une litanie. A chaque fois c'est une nouvelle réflexion intense. Forcément. On a le cerveau ramolli, les neurones qui se dilatent, la concentration qui fout le camp, le vocabulaire qui se carapate.
S'amariner - il dit. C'est un joli mot que je ne connaissais pas.
Je m'amarine, tu t'amarines.
C'est joli aussi à la deuxième personne. Ca fait tamaris, un tamaris au bord de la mer. Avec un petit vent léger qui fait voler les cheveux et respirer la peau.
Mais ici, il y a le bruit des voitures, avec cette déviation, c'est infernal, urbain, trop urbain, et ce camion-grue, là, il n'a pas le droit de passer ici, il doit faire le tour, là-bas - mais justement, il y a cette déviation.
Ca klaxonne il fait chaud le vent est décidément absent mais ce n'est pas si mal, c'est l'été, et pour se rafraîchir il y a les bières.
Et comme c'est toujours au début qu'elle est la meilleure, on en reprend une.
Il fait "lourd, hein".
Mais c'est l'été réjouissons-nous. Les insectes sont de sortie, nos orteils aussi. Rouges ils sont, sur les ongles. Ou bleus. C'est joli. Les miens sont violets. Comme un tamaris. Comme l'orage, qu'on attend, qu'on redoute, et qui finalement ne passera pas par là.
Les nuages sont repartis. Le soleil revient en force. La soirée avance, il fait de plus en plus chaud. La lune sera orange.
C'est bien.