Du mobilhome

Tous sont au rendez-vous. Les cousins, la grand-mère, les oncles et les tantes, les trois nouveaux-nés, les névroses, les jalousies, le souvenir des coups bas, les conflits de succession et les désillusions.

La table est dressée, clinquante, le champagne coule à flots comme les arrière-pensées. Les verrines mutlicolores ne cachent pas le noir du ressentiment. On s'observe, à travers les flûtes qui tchinnent.

Les convives respectent le plan de table. Toujours déjà raté, le plan de table.
L'entrée introduit les premiers tremblés, les premiers mots sur la crête,  les premières fissures.

Le plat de résistance convie les regards plus francs, plus osés et piquants.

Le fromage et la salade suivent. Pas de vers entre les feuilles vertes, mais le sinueux des sous-entendus qui percent entre les générations ou les fratries.

Puis viennent, avec les fruits, les friandises, la cerise de l'hystérie, les raisins de la colère, l'acide des gestes, le fiel. Le ton monte, les cris et les yeux percent, la grand-mère tremble, les bébés hurlent, tombent les chaisent et les masques, les accusations les lamentations, les larmes et la sueur, pas de sang, non, on sait se tenir, dans la famille, mais on se mettrait bien les poings dans la gueule, d'ailleurs, là-bas, sous un arbre, le père et le fils...

le père, le fils, la mère, la fille, comment voulez-vous qu'on s'aime...